LE COMBAT CONTRE LA BOMBE NE DESARME PAS

Publié le par Patrick Kaczmarek

Déclaration de plusieurs ministres des Affaires étrangères et représentants de haut rang de dix États qui se sont réunis à Berlin pour s’engager en faveur d’une nouvelle dynamique du désarmement et de la non-prolifération nucléaires. C’est la seconde réunion du groupe fondé le 22 septembre 2010 en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York.


1. Nous, ministres des Affaires étrangères de l'Australie, Canada, Chili, Allemagne, Japon, Mexique, Pays-Bas, La Pologne, la Turquie et les Émirats arabes unis réaffirmons notre volonté commune de travailler à la réalisation du désarmement nucléaire et le renforcement du régime international de non-prolifération, comme indiqué dans la déclaration conjointe adoptée lors de notre première réunion à New York le 22 Septembre 2010. Reconnaissant le danger pour l'humanité posé par la possibilité de l'utilisation des armes nucléaires et la nécessité de faire face à l'augmentation des risques de prolifération, de réduire les arsenaux nucléaires, de renforcer la sécurité nucléaire et pour améliorer la sécurité nucléaire, nous estimons qu'il est urgent de réduire les risques nucléaires et atteindre des résultats tangibles pour progresser sur la voie d’un monde exempt d'armes nucléaires.

2. Nous basons nos efforts sur le Traité de la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) comme le
fondement essentiel de la réalisation du désarmement nucléaire, la pierre angulaire de l'économie mondiale nucléaire du régime de non-prolifération, et la base pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire. Le résultat du consensus de la Conférence d'examen du TNP 2010 définit un programme pratique avec un Plan d'action couvrant les trois piliers du Traité, ainsi que l'objectif d'un Moyen-Orient exempt d’armes nucléaires et toutes autres armes de destruction massive. Nous sommes déterminés à promouvoir et mettre en œuvre les engagements pris par tous les Etats membres du TNP, et de plaider en outre pour  un progrès grâce à des contributions et des propositions concrètes.

3. Nous saluons et soutenons l'appel renouvelé à l'élimination totale des armes nucléaires comme la seule garantie contre leur utilisation ou la menace d'utilisation, et par conséquent la nécessité de réduire davantage le nombre d'armes nucléaires ainsi que leur rôle dans les stratégies de sécurité, des concepts, de doctrines et politiques. Nous sommes encouragés par les récents développements, en particulier l'entrée en vigueur du nouveau traité START entre les  EU et la Russie et de l'intention déclarée des deux parties à poursuivre le processus de réductions, en soulignant la nécessité d'inclure toutes les catégories d'armes nucléaires. Nous espérons vivement que tous les autres Etats dotés d'armes nucléaires suivront, tout en appliquant les principes des irréversibilités, de vérifiabilité et de transparence au processus de désarmement nucléaire.

4. Nous reconnaissons le droit des États parties à élaborer et à utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques énoncés dans le TNP. Nous nous associons à l'appel international pour l'élévation de la sûreté des centrales nucléaires au plus haut niveau et le renforcement des mesures de sécurité nucléaire dans le monde en raison du récent événement à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Nous soutenons les discussions qui ont déjà commencé aux niveaux national et régional ainsi que dans les instances internationales et organisations, en notamment à'AIEA. Nous nous félicitons de l'invitation par Directeur général Amano  de l'AIEA à un Conférence  ministérielle sur la sûreté nucléaire qui se tiendra à Vienne du 20 au 24 juin 2011.

5. Il est maintenant temps de revitaliser et de renforcer les efforts multilatéraux, en reconnaissant qu’aujourd'hui les problèmes de sécurité mondiale ont plus que jamais besoin de solutions coopératives et multilatérales. De nombreux articles du programme énoncé dans le plan d'action de la Conférence d'examen de 2010 ne peuvent être mis en œuvre que grâce à un effort multilatéral utile. Pour plus d'une décennie, la machine de désarmement multilatéral n'a pas répondu aux attentes de la communauté internationale dans la lutte contre les problèmes de sécurité par le biais de contrôles efficaces multilatéraux des armements et du désarmement, qui prélude d'énormes possibilités pour promouvoir la stabilité internationale, de faciliter le développement et l'augmentation de la sécurité pour tous. Le message de haut niveau de la réunion convoquée par le Secrétaire général de l’ONU le 24 septembre 2010 à New York est clair : la communauté internationale n'acceptera pas de perdre plus de temps. Nous sommes unis dans la demande de revitaliser le mécanisme de désarmement multilatéral.

6. Le consensus atteint l'an dernier par la Conférence d'examen du TNP sur les prospectives du plan
d’action prouve que la coopération, les efforts multilatéraux de désarmement et de non-prolifération ne peuvent fonctionner que s’il ya la volonté politique nécessaire. Notre objectif est de maintenir l'élan du succès de ces résultats et d'accélérer sa mise en œuvre. Dans ce but, nous avons adopté les propositions concrètes d'action suivantes sur des éléments clés du plan d'action.

Proposition I : Il ya consensus parmi les Etats membres du TNP que la production de matières fissiles pour les armes nucléaires doit être arrêtée. Un traité sur la production de matières fissiles (FMCT) devait réduire le risque de futures courses aux armements nucléaires et de réduire le danger que des acteurs non étatiques aient de tels éléments entre leurs mains. Un tel traité viendrait compléter les efforts en cours pour sécuriser des matières nucléaires vulnérables à travers le monde entier. C'est une étape indispensable sur la voie d’un monde exempt d'armes nucléaires. Nous sommes
profondément déçus qu'un an après la Conférence d'examen du TNP, qui appelle dans son plan d'action pour la négociation immédiate d'un tel traité à la Conférence du désarmement, cela n'ait pas été mis en œuvre. Tout en reconnaissant que les exigences de sécurité de tous les Etats doivent être abordées au cours de négociations, nous soulignons qu'il n'y a aucune raison et aucune excuse pour tarder plus.

Le 26 janvier, le Secrétaire des Nations Unies Ban Ki-moon a appelé à la création d’un processus informel pour aider à bâtir la confiance pour un tel traité, et renvoyer la CD à son programme. Nous avons entrepris des efforts intensifs pour surmonter l'impasse actuelle. A Genève, en marge de
la CD, l'Australie et le Japon ont co-organisé une série de discussions entre experts pour examiner les aspects techniques d'un tel traité, afin de créer une dynamique en vue de négociations. Lors de travaux à Vienne, dans un effort mené par l'Allemagne, nous avons élaboré un document sur la vérification effective sur les matières fissiles, qui énumère les questions qui seront abordées par des experts scientifiques et qui contient des contributions à leurs débats. Nous considérons que la création d'un groupe d'experts scientifiques dont les attributions sont d’examiner les aspects techniques d'un FMCT pourrait faciliter et contribuer au début des négociations. S'appuyant sur ces initiatives, nous continuerons à faire pression pour l'ouverture immédiate de négociations. Notre préférence reste à négocier un tel traité au sein de la CD. Toutefois, si la CD, dans
sa session de fond de 2011, reste incapable de trouver un accord sur le lancement de négociations sur le traité, nous demanderons à l'Assemblée générale des Nations Unies, qui est déjà saisie de la question sous le point 162 intitulé «Suivi de la réunion de haut niveau qui s'est tenue le 24 septembre 2010 : la revitalisation des travaux de la Conférence sur le désarmement et la poursuite des négociations multilatérales sur le désarmement », à aborder la question et de procéder à l’examen de moyens dans le but de commencer les négociations.


Proposition II: L’entrée en vigueur du Traité d'interdiction des essais nucléaires (TICE) est un autre objectif majeur sur la scène multilatérale. Nous appelons tous les États qui ne l'ont pas encore fait, à signer et à ratifier le TICE. Nous sommes encouragés par l'engagement exprimé par les États-Unis et L'Indonésie pour assurer la ratification du traité. Nous croyons que la fin effective des essais nucléaires renforce et n’affaiblit pas notre sécurité nationale ainsi que la sécurité mondiale et renforcerait considérablement la non-prolifération et le désarmement. Il y a 15 ans, le Traité a été ouvert à la signature, et le nombre de signataires et de ratifications a augmenté de façon constante. Nous nous engageons à l'universalisation du Traité et à la promotion de son entrée en vigueur. Utilisant diverses possibilités diplomatiques, nous exhortons les États qui ne l'ont pas encore fait, à signer et ratifier le Traité sans délai et compléter les mesures nécessaires pour son entrée en vigueur. Nous nous engageons à soutenir la préparation de la Commission du TICE à mettre en place un  système de surveillance efficace et nous saluon le travail déjà accompli.

Proposition III: A la Conférence d'examen de 2010, les États dotés d'armes nucléaires se sont engagés
à accélérer le progrès sur des étapes concrètes menant au désarmement nucléaire et d’en faire un rapport aux États membres au NPT.

En outre, comme mesure de confiance, la Conférence a encouragé les États dotés d'armes nucléaires de se mettre d'accord dès que possible sur un formulaire normalisé.

Nous développons un projet de format standard de déclaration qui pourrait être utilisé par les États dotés d'armes nucléaires en réunion comme engagement.  Nous allons inviter les États dotés d'armes nucléaires à examiner notre proposition lors de la réunion à Paris en juin. Ce format définit les attentes en matière d'information que nous aimerions que tous les États dotés d'armes nucléaires fournissent. Nous croyons que les rapports sur la base d'un format standard, comme préconisé dans le plan d'action adopté par la Conférence d'examen, pourrait s'appuyer sur la confiance internationale et contribuer à créer un climat propice à la poursuite du désarmement. Nous considérons qu'il est essentiel d'accroître la transparence et la responsabilisation dans le processus de désarmement nucléaire.

Proposition IV: Nous soulignons que l'efficacité du régime de non-prolifération est un intérêt de sécurité commune de toutes les nations. Nous reconnaissons le rôle important de l'AIEA pour vérifier le respect par les États nucléaires de leurs obligations de non-prolifération. Nous soulignons le fait que, avec l'entrée en vigueur des Protocoles additionnels de l'AIEA pour les Emirats Arabes Unis en décembre 2010 et pour le Mexique en mars 2011, tous les pays appartenant à notre initiative interrégionale doivent mettre totalement en œuvre les accords de garanties et de protocoles additionnels que nous considérons comme les vérifications nécessaires standards. Nous appelons tous les Etats, en conformité avec le Plan d'action de la Conférence d'examen de 2010, à conclure et mettre en vigueur des protocoles additionnels afin de donner à l'AIEA l'autorité et la crédibilité dont elle a besoin pour dissuader et détecter les violations des obligations de non-prolifération.

De continuez à préconiser bilatéralement et multilatéralement l'application universelle du protocole additionnel dans nos régions respectives.  Nous vous proposons de partager les expériences et les meilleures pratiques dans la conclusion et la mise en œuvre du protocole additionnel avec toutes les parties intéressées, et sommes prêts à fournir l’aide des services juridiques et autres.

7. Nous ferons le point des progrès sur les propositions d'aujourd'hui à notre prochaine réunion en marge de l’Assemblée générale de l'ONU en septembre. La réunion ministérielle 2012 de notre initiative sera accueillie par Turquie.

Nous allons continuer à travailler sur d'autres éléments clés du plan d'action adopté par la Conférence d’examen du TNP de 2010, comme indiqué dans notre déclaration commune du 22 septembre 2010. En particulier, nous avons l'intention de promouvoir l'établissement de zones franches d'armes nucléaires internationalement reconnues, sur la base de dispositions librement conclues entre les États de la région concernée, et conformément aux lignes directrices de 1999 de la Commission de désarmement de l'ONU, convaincus que de telles zones renforcent aussi bien la paix régionale et la sécurité mondiale et  renforcent le régime de non-prolifération nucléaire et contribuent à l'accomplissement du désarmement nucléaire.

À cet égard, nous soulignons la nécessité cruciale de promouvoir la création d'une zone exempte d'armes nucléaires et toutes autres armes de destruction massive dans le Moyen-Orient, conformément aux exigences de l'attente de l'organisation en 2012 de la conférence la spéciale convenue à la Conférence d'examen de 2010.

Nous allons également travailler sur des actions spécifiques visant à renforcer les systèmes de commande et d'exportation des Etats qui jouent un rôle de non-prolifération important.

Nous allons promouvoir activement le désarmement et l'éducation à la non-prolifération, fondée sur notre conviction que l'éducation est un outil puissant de mobilisation de la poursuite du désarmement et la non-prolifération à  l'échelle mondiale en améliorant la sensibilisation et la compréhension entre nos citoyens.

8. Nous sommes encouragés par l'intérêt qu’a suscité notre initiative à travers des régions et pour nos citoyens. Nous sommes reconnaissants à tous les Etats qui veulent joindre leurs efforts aux nôtres et soutenir nos propositions. C’est seulement un effort aussi large qui réussira dans la construction des ponts nécessaires et dans la réalisation du progrès significatif vers le renforcement mutuel des objectifs de désarmement nucléaire et de non-prolifération.

Berlin, le 30 avril 2011

Publié dans PAIX

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